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Par des détours sinueux
5 avril 2007

Ile Saint-Joseph, le 5 avril

Je voulais absolument voir les Iles du Salut. J’y parviens enfin. Sous un temps radieux, un vrai soleil de plomb, un vrai miracle.

aborder_l_ile

Bien étranges Iles du Salut. Si elles ont sauvé quelque colons des fièvres tropicales au XVIIIe siècle, elles sont ensuite devenues l’enfer des bagnards. L’Ile du diable a bien mérité son nom. Dreyfus, Seznec, Papillon (un imposteur ?!), un chapelet de noms célèbres à égrener : des enfers, des folies, des souffrances infinies, des morts désespérés, la pourriture tout autour. Et pourtant… ils durent avoir des jours comme aujourd’hui : un ciel bleu transcendé, un vent caressant, les oiseaux glissant doucement sur le zéphyr, la chanson de la mer.

balancoire

Inconciliables avec les brimades, la torture physique ou psychologique. Guyane paradoxale : « Il me semble que la misère serait moins pénible au soleil » comme dit la rengaine. Eh bien monsieur Aznavour pas ici : ici la misère ne pouvait être plus misérable!

Quelle tristesse ces carnets de bagne de Dreyfus où se répète cent fois, mille fois, sur les pages au milieu des équations mathématiques et des schémas correspondants, « ma chère Lucie, ma chère Lucie, ma chère Lucie ». En l’absence de l’aimé(e), son invocation, sa convocation, l’appel incessant, le murmure de son nom, à voix haute, à voix basse, dans les rêves, les insomnies, couché sur le papier, en graffiti sur les murs, c’est toujours l’espoir de voir l’aimé(e) surgir. Ne pas le perdre, ne pas le perdre, ne pas le perdre. Hantise démesurée.

« Ici on a fait un enfer au paradis », Albert Londres (!! à lire « Au bagne » -version en accès libre).
Un paradis infernal, où les corps étaient jetés en pâture aux requins et où les requins étaient nourris le reste du temps par le sang des bouchers pour être sûrs qu’ils ne s’éloignent pas. Tandis que la hantise du prisonnier était la perte de l’aimé, celle du gardien était la perte du prisonnier. Evasion !
Le bagne, règne de l’absurde inhumain. Faire déboiser l’île par les bagnards pour mieux les surveiller. Comment déboise-t-on une forêt tropicale ? Faire et refaire, sans cesse, tout bagnard est un sysiphe. Construire les murs de sa propre prison, se voir se tuer à petit feu.
Réclusion.

reclusion

Derrière ces barreaux, si je ne m’échappe pas, je m’échappe à moi-même, esprit errant sans corps avec le suicide pour seule obsession. Est-ce vivre que vivre privé de liberté ?

Marcher dans ces couloirs où régnent désormais le végétal et l'animal, passer la tête dans les cellules, certaines ont une grille au plafond, d'autres pas une seule ouverture; des lianes et des arbres s'infiltrent partout, des fourmis feuilles se déplacent en colonies, les structures métalliques rouillent, les murs se recouvrent de salpêtre et de moisissures. Ces ruines crépusculaires hurlent encore la souffrance.

      abre_envahissnat       dans_la_cellule

 

Avant de repartir, je profite des eaux bleues-vertes de l'Ile St-Joseph.

Quand j'arrive le soir chez Daphné, je retrouve Laure qui par l'avion de l'après-midi est arrivée. Pour fêter dignement nos retrouvailles à trois, nous décidons de nous faire un petit resto au bord de la plage. Mais avant cela, nous passons chez une amie de Daphné qui doit nous prêter du matériel pour notre escapade du week-end. Dans l'après-midi, Daphné a retrouvé son Evasion que Maxo a une nouvelle fois soignée. Soignée ? Hum hum... Une fois garée devant chez Françoise, Daphné remet le contact pour faire une manoeuvre et là, Pater Noster qui es in caelis, qu'as-tu fait pour que cette voiture rende à nouveau l'âme ???!!

Avouons que nous trouvons cela assez hilarant ! ... d'autant plus que grâce à la gentillesse de nos hôtes improvisées, nous réussissons à récupérer une voiture (une des leurs!) en moins de deux ! Maxo à 9h du soir est appelé à la rescousse (nous finissons par soupçonner qu'il nous adore... ) et muni d'un câble tracte la voiture vers son nouveau lieu de prédilection : le garage ! Quant à nous, après une rasade de rhum pour nous revigorer, nous partons enfin pour le resto. Laure, voilà une première soirée des plus épiques, non ?!

Une petite histoire de la Guyane :
http://www.terresdeguyane.fr/articles/histoire/default.asp

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